Illustration - Femme devant un porte fermée

Un arrêt de la Cour administrative d’appel de Toulouse en date du 13 septembre 2022 n° 19TL05036 rappelle la différence entre un placement en congé annuel et une suspension.

 

Faits

Mme B..., agent technique de deuxième classe, exerçait depuis 2002 des fonctions d'agent polyvalent à la crèche " les petits loups " de la commune de C... (Hérault).

A la suite d'un rapport de son supérieur hiérarchique faisant état de comportements inadaptés envers les enfants, l'intéressée a été placée d'office, par décision du 7 avril 2016, en congés annuels du 8 avril au 23 mai 2016.

Elle a été mutée au service des espaces verts par décision du 11 mai 2016.

Puis l'intéressée a été placée, après avis du comité médical, en congé de maladie ordinaire à compter du 12 avril 2016 pour une durée d'un an.

L'avis émis le 15 décembre 2016 par le conseil de discipline a été suivi par la collectivité qui n'a prononcé aucune sanction.

L'intéressée a ensuite été mutée au service technique par décision du 21 février 2017.

 

Rappel sur les congés annuels

Prévus par le décret n°85-1250 du 26 novembre 1985 relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux, les congés annuels sont de droit pour tout fonctionnaire territorial en activité.

Pour une année de service accompli du 1er janvier au 31 décembre, le congé annuel est d'une durée égale à 5 fois ses obligations hebdomadaires de service. Cette durée est appréciée en nombre de jours effectivement ouvrés.

A titre d’exemple, s’il travaille 4 jours (matins et après-midi), l’agent bénéfice de 5 x 4 = 20 jours. S’il travaille 5 jours (matin et après-midi), il obtiendra donc 5 x 5 = 25 jours.

Ces jours de congés annuels sont considérés comme service accompli.

Aux termes de l'article 3, le calendrier des congés annuels est défini, par l'autorité territoriale, après consultation des fonctionnaires intéressés, compte tenu des fractionnements et échelonnements de congés que l'intérêt du service peut rendre nécessaires. Les fonctionnaires chargés de famille bénéficient d'une priorité pour le choix des périodes de congés annuels.

Ainsi, l'organisation des congés annuels est soumise à l'autorisation du chef du service qui peut les refuser ou les imposer lorsque les nécessités de services l'exigent.

 

Rappel sur la suspension

En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline. Cette suspension peut durer jusque 4 mois, conformément aux dispositions de l’article L. 531-1 du code général de la fonction publique.

La suspension est donc une mesure provisoire qui ne présente pas par elle-même un caractère disciplinaire mais qui est destinée à écarter temporairement un agent du service, en attendant qu'il soit statué disciplinairement ou pénalement sur sa situation.

La cour indique que cette suspension « peut être légalement prise dès lors que l'administration est en mesure de formuler à l'encontre de l'intéressé des griefs qui ont un caractère de vraisemblance suffisant et qui permettent de présumer que celui-ci a commis une faute grave ».

 

Raisonnement de la Cour

La décision du 7 avril 2016 de la maire de C... plaçant Mme B... en congé annuels du 8 avril au 23 mai 2016 a été prise afin de l'éloigner de la structure petite enfance, à la suite d'un rapport du supérieur hiérarchique de l'intéressée signalant des comportements inadaptés envers des enfants.

En plaçant Mme B... dans une telle position sans que les nécessités de service le justifient, alors qu'il appartenait dans ce cas à l'autorité hiérarchique de la suspendre de ses fonctions, la commune de C... a commis une faute de nature à engager sa responsabilité.

Néanmoins, la requête de l’agent a été rejetée, car la Cour a considéré que l’agent ne démontre pas qu’il a subi un préjudice :

« Mme B... n'apporte toutefois aucun élément de nature à établir que la position de congé annuel d'office dans laquelle elle a été illégalement placée ait été pour elle à l'origine d'un préjudice direct et certain correspondant à la différence entre le salaire qu'elle aurait perçu si elle avait pu normalement effectuer son service et celui qui a été le sien.

De la même manière, l'intéressée ne justifie pas plus en appel qu'en première instance que son placement en congé annuel d'office ait été à l'origine d'un préjudice moral correspondant à une atteinte à sa réputation.

Il ne résulte pas non plus de l'instruction que le préjudice financier que Mme B... allègue avoir subi du fait de son placement en congé de maladie ordinaire soit en lien direct et certain avec son placement en congé annuel d'office.

[…]

la demande de Mme B... sollicitant l'engagement de la responsabilité de la commune pour ne pas lui avoir confié de mission lors de son affectation aux services techniques est irrecevable, faute d'avoir été précédée d'une réclamation préalable. La circonstance qu'elle a présenté une telle demande au cours de la présente instance d'appel, le 15 février 2020, qui a été rejetée le 11 mars 2020, n'a pu avoir pour effet de régulariser l'irrecevabilité entachant sa demande de première instance. Par suite, ses conclusions tendant à l'indemnisation de ce chef de préjudice doivent être rejetées. »

Toutefois, même si la Cour a rejeté la demande de l’agent, il faut veiller à prendre la décision la plus adaptée à la situation.

En cas de doute, le service statutaire peut être saisi pour vous accompagner dans la démarche.

 

CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 13/09/2022, 19TL05036, Inédit au recueil Lebon (Source : www.legifrance.gouv.fr)
Décret n°85-1250 du 26 novembre 1985 relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux (Source : www.legifrance.gouv.fr)
Article L531-1 - Code général de la fonction publique (Source : www.legifrance.gouv.fr)